La Polynésie, comme toutes les terres du monde, est victime d’insectes ravageurs. La mouche des fruits orientale par exemple, introduite a la fin des années 90, cause des dégâts importants et donc des soucis aux agriculteurs. Pour les producteurs qui ont banni les intrants, des solutions existent. Elles sont testées par la Direction de l’Agriculture.
« Je suis entomologiste ».
C’est ainsi que Julie Grandgirard se présente. Elle travaille à Papara, à la cellule Recherche, innovation et valorisation de la Direction de l’agriculture. Mais quel rapport peut-il bien y avoir entre une entomologiste et un agriculteur biologique ?
« Les auxiliaires », répond-elle. Les auxiliaires sont des organismes qui régulent naturellement les populations de ravageurs. Les insectes auxiliaires sont des prédateurs ou des micro-guêpes qui tuent les ravageurs des cultures. Pour les agriculteurs aux productions certifiées biologiques qui ne veulent et ne peuvent utiliser de pesticides chimiques, ce sont des outils de choix. Mais pour pouvoir les utiliser, il faut bien connaître les ravageurs.
Quatre espèces de mouche des fruits sont implantées en Polynésie.
Elles attaquent des fruits cultivés (bananes, agrumes, goyaves, mangues, etc.) et sauvages (goyaves de Chine, ‘autera’a, māpē, etc.) ainsi que les tomates et les poivrons. Le cycle de ces mouches est bien connu : les œufs sont pondus sous la peau des fruits. Les larves sortent des œufs et se nourrissent de la chair du fruit. Elles quittent ensuite le fruit pour s’enfoncer dans le sol où elles forment une sorte de « cocon ». Enfin, une mouche émerge du « cocon », prête à s’accoupler, puis à infester d’autres fruits avec ses œufs.
Après l’arrivée de la mouche des fruits orientale, la DAG a introduit une micro-guêpe (Fopius arisanus) pour contrôler naturellement les populations de mouches des fruits dans les îles infestées.
« La DAG élève et lâche des micro-guêpes depuis 2002. Elle a été accompagnée dans la mise en place de ce projet par l’USDA de Hawaii qui avait déjà effectué des recherches et des tests avant même que nous soyons concernés. La micro-guêpe pond ses œufs dans les œufs de la mouche et la dévore de l’intérieur.»
Aujourd’hui, la DAG est autonome. Elle a relâché 190 000 Fopius arisanus dans 16 îles en 2020. Les micro-guêpes permettent d’éliminer environ 50% des mouches. Pour un meilleur contrôle, des solutions complémentaires et naturelles existent et sont à la portée de tous : détruire les fruits tombés au sol pour tuer les larves en développement, placer des pièges à phéromones pour tuer les mâles et empêcher la reproduction des mouches et utiliser des appâts protéinés pour tuer les femelles à la saison des fruits.
Sur le même schéma, la DAG lutte contre Brontispa longissima, l’hispine du cocotier. Il s’agit d’un petit coléoptère noir et marron, cousin de la coccinelle qui vit dans la flèche, dans les palmes qui ne sont pas encore ouvertes.
« De ce fait, on ne voit pas quand un cocotier est infesté ou non, on le découvre quand c’est déjà trop tard »,
explique Julie Grandgirard. Ce coléoptère est présent depuis les années 1960. Une micro-guêpe du genre Tetrastichus participe à la lutte contre cet ennemi. Un million d’individus de Tetrastichus ont été relâchés dans 18 îles en 2020. L’élevage se fait à Papara, dans les laboratoires de la DAG.
Les micro-guêpes permettent d'éliminer environ 50% des mouches.
1-Les insectes sont nourris en laboratoire. Tous les stades de développement sont contrôlés grâce à une nourriture adaptée.
2- Ils passent au stade adulte dans des sortes de volières où a lieu ensuite la reproduction.
3- Des milliers d’adultes voient le jour dans les volières. Ils sont ensuite envoyés dans les îles pour être relâchés.
4-Chaque jour des agents trient les larves en fonction de leur développement.
« Pour les années à venir, nous souhaitons développer des élevages d’auxiliaires locaux, comme des coccinelles qui existent déjà sur place, pour renforcer les populations existantes et proposer une alternative aux pesticides. Nous en sommes au stade de la mise au point de l’élevage ».
En parallèle, dans le cadre du programme PROTEGE (financé par l’Union Européenne dans le cadre du 11e Fonds Européen de développement régional) nous travaillons sur les plantes refuges pour les auxiliaires. Ce sont des plantes qui permettent d’attirer et de maintenir les auxiliaires locaux dans les par celles agricoles et améliorer ainsi le contrôle des ravageurs. « Des essais sont en cours pour identifier les plantes les plus intéressantes localement », résume Julie Grandgirard. Tout un programme. Le projet a démarré il y a peu, il va durer jusqu’en 2022.
Des travaux sont menés sur les plantes refuges. Différentes espèces végétales sont cultivées pour être ensuite testées auprès des auxiliaires.
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