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Nouvelle-Zélande

Textes : Alix Bauer


Selon un rapport alarmant révélé par The Guardian, près de 4 000 espèces animales et végétales seraient en voie de disparition en Nouvelle-Zélande. La raison ? Une politique agricole, avec l’élevage notamment, très agressive pour l’environnement et l’eau, en particulier depuis ces 20 dernières années.



Vous le savez sans doute, si vous lisez InstanTANE et Tama’a depuis leur création en 2017-2018, la rédaction

est particulièrement attachée à Aotearoa (Nouvelle-Zélande), de façon personnelle comme professionnelle.

Pour cela, la nouvelle concernant ce magnifique pays dévoilée il y a quelques semaines par The Guardian

(18 avril 2019, cf. encadré) nous a alarmé.


Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que des Kiwis nous préviennent, touchant parfois notre enthousiasme et notre admiration : qualité indéniable du bœuf mais pratiques de séparation de mères et veaux d’un autre âge, réduction catastrophique des aires forestières, notamment primaires, eaux polluées, pratiques de pêches invasives… The Guardian ne fait finalement qu’écrire, sous couvert d’enquête détaillée, ce que l’on redoutait depuis plus de 10 ans.


L’image d’Epinal d’une Nouvelle-Zélande naturelle, authentique, la grande bouffée d’air pur du Pacifique sud, serait-elle usurpée ?

Extinctions massives

Pour la première fois depuis 2015, un rapport environnemental majeur, évoqué par The Guardian,

a rendu des conclusions concernant la situation de ce magnifique pays du Pacifique sud.


Ce rapport, Environnement Aotearoa, est alarmant. Selon les chiffres du ministère de l'Environnement,

la Nouvelle-Zélande est l'un des pays au monde ayant le plus souffert de la présence de l'être humain, responsable de l'extinction de 75 espèces animales et végétales (depuis l’époque des Maoris jusqu’à nos jours). Mais aujourd'hui, près de 4 000 espèces seraient directement menacées. Île jadis paradisiaque pour les oiseaux, elle est désormais en danger : 90 % des oiseaux marins et 80 % des oiseaux terrestres, selon Environnement Aotearoa, seraient menacés d'extinction, même si l'ampleur réelle de ce qui disparaît est difficile à connaître précisément : seules 20 % des espèces qui composent la faune et la flore néo-zélandaises ont été répertoriées à ce jour.



Complaisance et procrastination

« Les espèces et les écosystèmes disparaissent plus vite en Nouvelle-Zélande que dans n'importe quel autre pays, explique Kevin Hague, en charge de la protection des forêts et des oiseaux.

Nous sommes en train d'endommager notre habitat naturel d'une manière irréversible. »


Dans une interview accordée à Newstalk ZB, Kevin Hague estime que le pays est tombé avec complaisance dans le piège de son « image verte » et qu'il subit aujourd'hui les effets dévastateurs de « plusieurs décennies de déni puis de procrastination (remise au lendemain d’actions à entreprendre) ».


Depuis une vingtaine d'années, la politique agricole du pays a par exemple fait preuve d'une grande agressivité, avec un réel impact sur la qualité de l'eau. L'augmentation massive du nombre de vaches se révèle notamment dévastatrice et les pesticides, largement utilisés (alors que l’on croit toujours que la Nouvelle-Zélande est presque épargnée par cette engeance phytosanitaire industrielle) et finalement peu réglementés, ont largement contaminé les sols et cours d'eau du pays.


C'est d'ailleurs l'une des principales promesses de campagne de la Première ministre Jacinda Ardern, qui s'était engagée à assainir les lacs et les rivières afin que les générations futures puissent à nouveau s'y baigner. Selon le rapport, la qualité de l'eau est mauvaise dans environ 57 % des lacs et 76 % des poissons d'eau douce sont menacés d'extinction ou en voie de disparition. Un tiers des insectes d'eau douce sont également en danger. « Il n'y a plus un instant à perdre pour bouleverser notre comportement vis-à-vis de la nature, s'alarme Kevin Hague.


« Nous avons besoin d'une économie qui restaure notre environnement,

pas d'une économie qui le détruit. »



Objectif 2050

La Première ministre Jacinda Ardern a déclaré que la législation permettrait à la Nouvelle-Zélande de contribuer à l'objectif planétaire moyen de maintenir le réchauffement climatique en dessous de 1,5 degré Celsius par rapport aux niveaux précédant la révolution industrielle.


Néanmoins, le projet de la cheffe de gouvernement kiwi ne dit pas explicitement comment l'économie

néo-zélandaise parviendrait à cet objectif de neutralité carbone d'ici 2050, déclenchant les foudres des écologistes. Surtout que le secteur agricole, l'une des plus grosses sources de revenus à l'exportation,

a obtenu d'importantes concessions. Le méthane biologique produit par le bétail par exemple, qui représente un tiers environ des émissions de gaz à effet de serre de la Nouvelle-Zélande, n'est pas vraiment concerné

par cet objectif ambitieux.



Le projet de loi, qui doit passer par un vote au Parlement d'ici la fin de l'année, prévoit de réduire de 10%

la production de méthane d'ici 2024. “L’agriculture est incroyablement importante pour la Nouvelle-Zélande, mais elle doit aussi contribuer à la solution", a prévenu le ministre du Changement climatique James Shaw. 

La fédération des agriculteurs a cependant critiqué cet objectif de seuil, accusant le gouvernement “de renoncer au pastoralisme”. Son vice-président, Andrew Hoggard, a notamment dénoncé : “ Soyons clairs, la seule façon d'atteindre des objectifs de ce niveau, c'est de réduire la production […] A l'heure qu'il est, nous n'avons aucune idée de comment atteindre ces réductions sans abattre un nombre significatif de têtes de bétail".

 

Bonne lecture

The Guardian est un quotidien d’information britannique fondé en 1821. Alors que la diffusion papier du quotidien a chuté de 60 % dans les années 2010 (à 150 000 exemplaires par jour au lieu de près 1 million en 1990), le site internet du Guardian est l'un des plus lus au monde (il se classe en 2012 au troisième rang des sites de presse les plus consultés du monde, derrière le Daily Mail et le New York Times).


Le site accueille plus de 150 millions de visiteurs uniques par mois, dont les deux tiers viennent de l'étranger.



InstanTANE #08



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