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Domaine du rucher Manumeri & Bio autonome, au cœur de Tubuai

Manumeri, situé au pied du mont Taita’a à Tubuai. Un terrain familial de deux hectares, isolé en pleine montagne, qui ressemble à un jardin d’éden empli d’arbres fruitiers les plus divers. La particularité du lieu ? Il travaille le plus souvent en solo, aidé ponctuellement par Olga, son épouse. Des produits transformés sur place, vendus à Tubuai et à Tahiti. Un domaine 100 % autonome. Et 100 % bio.


© Texte : Doris Ramseyer - Photos : Doris Ramseyer, sauf mention



Culture de café

Le ciel est gris, dénué de pluie, les oiseaux pépient dans les arbres. Les poules et coqs évoluent en toute liberté, gourmands de fruits, mais aussi de cent-pieds. Le jardin jouxte la forêt, tout est nature et verdure. Le domaine du Rucher Manumeri abrite un millier de pieds de café, de trois variétés différentes. Au niveau inférieur de la parcelle, s’étalent des caféiers plantés dans les années 1980 de type Catimor, à l’ombre des grands falcatas. Délaissé durant une trentaine d’années, le terrain s’est recouvert d’une végétation dense et impénétrable.


Avant, c’était la brousse, ici ! déclare Philippe, qui entre autres, a été correspondant de quotidiens locaux, reconverti en arboriculteur. Avec son épouse, ils ont défriché et nettoyé le terrain. On travaille uniquement à la main, et au maximum sans machine, pour ne pas dénaturer la structure du sol ; un engin aurait fait le travail plus rapidement, mais dès la première pluie, la bonne terre serait partie tout aussi rapidement ! explique Philippe. Ils ont conservé le couvert végétal pour les caféraies, qui ne supportent pas un soleil franc.


Caféraie en cours de recépage étalé sur 3 ans. 3 variétés de cafés poussent dans le domaine, commercialisés à Tubuai et Tahiti
Caféraie en cours de recépage étalé sur 3 ans. 3 variétés de cafés poussent dans le domaine, commercialisés à Tubuai et Tahiti

Les plants de café sont recépés tous les six ans en alternance sur chacune des trois cultures, afin d’éviter une année blanche, improductive. Les pieds sont ainsi coupés à 30 centimètres du sol ; les branches sont laissées sur place : leur décomposition va nourrir la terre pour la prise des pieds de café. L’année suivante, les caféiers fleurissent à plusieurs reprises, se couvrant de belles fleurs au parfum de jasmin, mellifères de surcroît. Ce n’est que l’année suivante, soit deux ans après le recépage, que les baies apparaissent.


Philippe procède également à la sélection des tiges. Sur chaque pied, il ne conserve au maximum que trois tiges, qui seront les branches porteuses. Il étête aussi chaque année les bourgeons terminaux des branches, pour éviter que l’arbuste ne pousse trop haut. Si les plants ne sont pas écimés, il y a perte d’énergie pour la plante, précise l’arboriculteur. Des plants de Typica

croissent un peu plus loin, une variété qui fait partie des premiers cafés introduits en Polynésie, peu productive ; mais comme le rappelle Philippe : on va jusqu’au bout de nos entreprises. On peut isoler et identifier tous les lots de ce que l’on produit, jusqu’à la torréfaction, à l’inverse d’un grand producteur. Plus haut dans le domaine, se déploient des Red Caturra, dont les plants viennent de Rapa. Les pieds de café ont été recépés en même temps que la plantation du bas, en 2022. Qui a fleuri en août 2023. Et qui sera bientôt récoltée, en 2024.


 

Arbres fruitiers

Au point de départ, nous ne recherchions pas la commercialisation, nous plantions nos produits simplement pour les consommer, explique Philippe Paccou, gérant du domaine Manumeri. Le nom provient du Miel du Rucher Manumeri, qu’il crée dès les années 2000. Aujourd’hui, une quarantaine de ruches fournissent un miel multifloral : les abeilles se gorgent de nectar dans ce jardin aux mille saveurs. L’aventure du domaine a commencé dès 2012, quand Olga et Philippe ont peu à peu investi les lieux, Philippe étant à la retraite. Ils ont délaissé le rivage, pour se hisser dans les hauteurs verdoyantes de l’île. À force de nettoyer le terrain, et puisque nous replantions toujours quelque chose pour occuper l’espace, l’abondance est arrivée et, avec elle, le commerce, commente Philippe. Douze ans plus tard, le jardin, cultivé sur deux hectares, regorge de nectars et de fruits, des plus communs aux plus exotiques. Goyaves, ananas, fruits du jacquier, uru, rollinia, papayes, mangues, avocats, mûres, grenades, pacayes, coeurs-de-boeuf, pommes étoile, corossols, caramboles, longanes, litchis, fruits de la passion, potirons, abiu, figues, ahia tahiti (pommes d’amour), bilimbi…

 

Transformation et autonomie

Tout ce que l’on produit ici, quand on le transforme, on le fait sur le domaine, précise Philippe. Traitement du café, chocolat, confitures, bananes séchées, miel. Tous les produits sont valorisés afin d’en perdre le moins possible, même si on a quand

même beaucoup de pertes. On transforme environ 10 % de notre production de fruits. Car, sur le domaine, ils sont une toute petite équipe, qui travaille au maximum de ses possibilités.


Philippe prépare des confitures aux fruits « classiques » (mangues, goyaves, papayes, etc.) ou plus inhabituelles, comme aux litchis, fruits du jacquier, à l’orange bigarade, à la pomme étoile... Les confitures sont vendues à Tubuai uniquement. À la saison des litchis, une partie de la récolte est exportée à Tahiti, le reste est conservé en vue de confectionner des confitures au besoin. La chair est extraite des fruits, puis congelée. À Tahiti, les produits Manumeri (bananes séchées, café et miel) sont commercialisés auprès de la CEDIS, la centrale d’achat des grands supermarchés de l’île (Carrefour, Champion et Easy Market).

Le domaine abrite plusieurs cacaoyers. Lors de la récolte des cabosses, il faut veiller à ne pas arracher les points où naissent les fleurs de cacaoyer, car il n’y aurait alors plus de bourgeons floraux. Au fur et à mesure des cueillettes, chaque année est l’occasion de réaliser une étape en plus dans le traitement du cacao.


La beauté toute discrète, de la fleur de Bilimbi.
La beauté toute discrète, de la fleur de Bilimbi.

L’écabossage et la fermentation des fèves (une phase importante, dont la réussite garantit au cacao son parfum), le séchage, puis dès 2023 : torréfaction, broyage des fèves et préparation de la pâte de cacao jusqu’au chocolat ! Le café est également traité sur place. Quand les baies devenues bien rouges arrivent à maturité, c’est le temps de la récolte. Manuellement. Une à une. De plus, les baies ne mûrissent pas toutes en même temps. C’est un travail long et laborieux.


Chaque soir, les cerises récoltées passent à la dépulpeuse manuelle, installée dans le jardin. Philippe la fait tourner, et les grains sont débarrassés de leur pulpe avec un filet d’eau. Ils fermentent ensuite pendant 24 heures dans l’eau, c’est le mucilage. Le lendemain, les grains sont lavés, et placés sur de grandes grilles posées au soleil pour le séchage, avant le stockage.

Plus tard, suivront les étapes de décorticage de la parche pour obtenir du café vert, avant de le torréfier artisanalement. Le domaine produit en moyenne 200 kilogrammes de café par an. La parcelle est entièrement autonome en électricité (panneaux solaires) et en eau (petite station de relevage). L’eau parvient à la pompe par gravité, captée dans la rivière Huurani, donc sans impact sur la nappe phréatique. Elle fonctionne grâce à des panneaux solaires – sans batteries – pour acheminer l’eau à plus de 300 mètres en amont, vers la maison et dans la plantation du potager ; celles du verger ne sont arrosées qu’à la plantation, pour la reprise.


Variété et abondance

Le domaine est 100 % bio, et même extrême bio, car, sans engrais, sans pesticides, et chaque plante produit à son rythme, sans jamais être stimulée. Nous ne sommes pas à la recherche de rendement. Aussi parce que nous sommes une équipe très réduite ! note Philippe, qui ajoute : c’est un plaisir de faire ce que je fais !


L’arboriculteur cueille un citron énorme, au parfum délicieux. C’est le Cédrat, l’ancêtre des citrons. Il peut s’utiliser en pâtisserie. Pour

réaliser des citrons confits, très appréciés, on coupe des tranches de citron, sa chair blanche et son écorce. On ôte la partie centrale contenant les pépins, avant de les confire au sucre.

Pour une recette plus gourmande, il suffit de rajouter un coulis de chocolat fondu !

Plusieurs types d’agrumes poussent ici : oranges amères (Bigaradier), oranges, pamplemousses, combavas, mandarines, citrons verts, citrons Main de Bouddha aux formes originales (cédrat digité), citrons tanepau. Mais aussi des bananes : bananes fei, bananes Musa Benedetta (mains en forme de soucoupe) et autres variétés.


En face de la maison, le couple a installé un potager qui complète l’autosuffisance, entouré de clôtures, contre les volailles. On pourrait ne consommer que les produits de notre parcelle ! s’exclame Philippe. Hormis les arbres fruitiers, il y a aussi du santal, de l’anacardier (noix de cajou), du bois d’Inde (laurier utilisé pour parfumer les plats), un olivier, des tubercules (manioc, taro), du rea tahiti (curcuma), du gingembre tinto, du gingembre mangue, et aussi du thym, romarin, basilic et jasmin (pour parfumer le riz). La liste est non exhaustive…


Le domaine abrite une quarantaine de ruches fournissant un miel multifloral
Le domaine abrite une quarantaine de ruches fournissant un miel multifloral

Apiculture

Les abeilles sont partout. L’apiculteur explique : le miel monofloral est impossible à obtenir ici à Tubuai. Il s’enrichit de tout ce que les abeilles peuvent butiner ! Nous produisons en moyenne une tonne de miel par an, entièrement bio, puisque nous ne nourrissons jamais les abeilles. Fin 2023, la miellée était infime. Les colonies des ruches sont assez fortes, mais avec le changement climatique, tout est affecté. Si les plantations sont perturbées, les abeilles le sont aussi.


Les ruches disposent d’un fond aéré, en prévention contre les teignes, et sont dénuées de planches d’envol. Si on ne s’en occupe pas, les ruches deviennent des gîtes de multiplication de maladies, qui se propagent ensuite dans les autres ruches. L’apiculteur est un passionné. Il passe une fois par semaine auprès de ses butineuses, dès la saison de redémarrage des colonies en octobre. Puis, il y a le marquage des reines, le début de la division des colonies, et l’élevage des reines un peu après le début des miellées. Les abeilles produisent du miel, mais aussi de la cire, que l’apiculteur utilise pour faire de la cire gaufrée (support sur lequel les abeilles vont construire leurs rayons).


À côté des ruches, pousse un cytise, aux belles fleurs jaunes et parfumées. Et un dattier, dont les hampes florales sont un régal pour les abeilles, tout comme les longues grappes de petites fleurs blanches du faux santal. Le Caïmitier se remet à fleurir, même si janvier n’est pas sa saison de floraison ; il offrira des pommes étoile vertes. Les abeilles ont de quoi festoyer…


Le domaine du Rucher Manumeri est à la fois une merveilleuse aventure au rythme de la nature, mais aussi le défi d’un couple, d’une île, et d’un territoire logé au coeur du Pacifique, qui a réussi à produire, à la force des bras, des produits d’excellence 100 % fenua, 100 % Tubuai.


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INGREDIENTS pour 4 gourmands

(pour 4 pots de 360 g)


  • 1 kg de litchis épluchés et dénoyautés

  • 800 g de sucre cristallisé pour confiture

  • 30 ml de jus de citron


Astuce

Vous pouvez utiliser d’autres fruits à la place des litchis.



PROGRESSION

Préparez d’abord vos bocaux : les bords doivent être bien lisses, les couvercles en bon état. Plongez vos bocaux et leur couvercle dans une casserole remplie d’eau. Ils doivent être complètement immergés.

Faites-les bouillir progressivement pendant une dizaine de minutes. Récupérez les bocaux avec une pince, et posez-les, tête en bas, sur un linge propre. Idem pour les couvercles, sans les essuyer. Laissez refroidir.

Épluchez et dénoyautez les litchis, puis mixez grossièrement la pulpe de fruits à l’aide d’un mixeur plongeant pour obtenir de petits morceaux. Dans une bassine à confiture, mélangez la pulpe avec le sucre, et mettez à cuire. À l’aide d’un thermomètre à confiture, portez la cuisson à ébullition jusqu’à atteindre les 104 °C.

Ajoutez alors le jus de citron qui aidera à préserver la couleur des fruits. Laissez cuire encore quelques minutes, sans dépasser la température indiquée. Transvasez immédiatement la confiture dans les bocaux à l’aide d’une louche.

Fermez les pots, retournez-les quelques minutes, afin de faire le vide d’air et d’assurer une meilleure conservation. Laissez refroidir. Vérifiez l’aspect concave du couvercle, preuve de son étanchéité. À déguster dès le lendemain. Conservation : un an ou plus, au sec et à l’abri de la lumière. Une fois ouvert, conservez le pot au réfrigérateur pendant environ un mois.

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